Cannes, petit guide de survie
- Christophe Mené
- il y a 8 heures
- 14 min de lecture

Visite dans le royaume des paillettes et des désillusions
Le Festival de Cannes, c’est un peu comme un vieux rêve qu’on fait les yeux ouverts et dont on se réveille parfois avec la gueule de bois, un monde parallèle pavé de films magnifiques, d’acteurs inaccessibles, de files d’attente et de soirées où l’on entre difficilement. J’y suis allé pour la première fois à l’âge de 20 ans, au début des années 80, muni d’une carte d’étudiant en cinéma. L’époque était à la débrouille, au culot, et je voulais voir le maximum de films. C’était Cannes avant Instagram. Aujourd’hui ? Le Festival charrie toujours son lot de fantasmes, mais ce n’est plus tout à fait le même rêve.
De la Palme au selfie : métamorphoses d’un festival pas tout à fait comme les autres
Si vous cherchez un lieu où l’histoire du cinéma se mêle au cirque mondialisé de l’image, inutile d’aller plus loin : bienvenue à Cannes. Le Festival, né en 1946 pour damer le pion à la Mostra de Venise alors compromise par le fascisme, a mis du temps à devenir ce qu’il est aujourd’hui : un cocktail de prestige, de politique, de vanité... et, parfois, de cinéma.
Les années 60 : la Nouvelle Vague secoue la Croisette
Dans les années 60, Cannes est encore un festival dominé par les représentants officiels de chaque pays, les jurys consensuels, et les films dits “de prestige” - en clair : ennuyeux. Puis arrivent Truffaut, Godard, Resnais, Chabrol, et tout ce petit monde commence à déranger les bonnes manières cannoises avec leurs films nerveux, modernes, filmés à l’épaule.
En 1968, le festival est carrément interrompu. Les étudiants sont dans la rue, Godard s’accroche au rideau d’une salle pour empêcher une projection, Claude Lelouch rend sa caméra, Louis Malle s’énerve. On baisse le rideau : c’est le premier (et dernier) Cannes annulé… C’est là que Cannes devient un festival d’enjeux - esthétiques, politiques, culturels. Et aussi un territoire d’ego surdimensionnés.
Les années 70-80 : Palmes et premières polémiques
Pendant les années 70, Cannes devient un festival où l’on peut voir à la fois un chef-d’œuvre de Tarkovski et une Palme d’Or attribuée à un film dont tout le monde oubliera le nom dans la foulée. La sélection est éclectique, parfois farfelue. Mais les grands noms défilent : Fellini, Herzog, Coppola, Kurosawa. En 1979, Apocalypse Now décroche la Palme ex æquo avec Le Tambour de Volker Schlöndorff... cette double récompense n'est jamais une solution satisfaisante.
Les années 80 sont plus clinquantes, avec une montée en puissance de l’industrie américaine. Les blockbusters apparaissent hors compétition, les studios sentent le filon marketing. En 1989, Spike Lee ne reçoit pas la Palme pour Do the Right Thing et crie au scandale : un réflexe qui deviendra une tradition annuelle.
Les années 90-2000 : l’ère du tapis rouge et des caméras
Cannes devient alors un théâtre médiatique de grande ampleur. La montée des marches est retransmise en direct, chaque long-métrage est un événement. Sharon Stone, Madonna, Tarantino, Kidman... Le cinéma devient image avant même d’être film. La presse people s’installe à côté des critiques d’art et les agents se battent pour deux secondes d’exposition.
En 1994, Pulp Fiction gagne la Palme : une Palme “cool”, qui change à jamais la perception du jury. Cannes devient un terrain de jeu pour auteurs transgressifs. Gaspar Noé, Lars von Trier, Bruno Dumont, Catherine Breillat... tout ce qui choque fait parler. Et ce qui fait parler vend. Une mutation est en marche.
Les années 2010-2020 : influenceurs, plateformes et conflits de modèles
Le XXIe siècle apporte son lot de bouleversements. Le numérique transforme la production et la diffusion. Netflix débarque et Cannes fait la moue. En 2017, deux films produits par la plateforme sont en compétition. Tollé. Dès l’année suivante, les films sans sortie en salle sont interdits en compétition. En parallèle, les influenceurs colonisent la montée des marches. Des inconnus (mais suivis par 3,2 millions d’abonnés) posent dans des robes de créateurs pour faire “genre Cannes”. On ne sait plus très bien si on est à un festival de cinéma ou à un showroom pour marques de bijoux. Les selfies sont interdits (officiellement), mais prolifèrent comme les badges presse “photo seulement”.
Le cinéma d’auteur est toujours là, mais désormais en compétition avec TikTok et les algorithmes. Certains films n’existent qu’un quart d’heure, le temps d’une standing ovation calculée. On se demande parfois si la salle Lumière est encore un lieu de révélation, ou juste un photocall géant à 8h du matin.
Et aujourd’hui ?
Cannes oscille entre l'image d’un festival prestigieux qui continue de consacrer de grands films (Jane Campion, Bong Joon-ho, Ruben Östlund…), et celui d’un rituel de représentation sociale où il faut “être vu” pour exister. Les cinéastes indépendants y trouvent encore un écho, à condition de défendre leur œuvre avec un pitch parfait. Le Marché du Film, lui, est devenu une bourse internationale où les projets se vendent parfois sur une ligne, une affiche et un sourire tendu.
Cannes est toujours là. Épuisant, vertigineux ou grotesque, mais nécessaire tout de même.
Le marathon : files d’attente et nerfs d’acier
Être à Cannes, c’est un sport de combat. Il faut se lever tôt pour espérer récupérer les invitations aux projections, supporter des files d’attente interminables, développer une endurance de marathonien. Le festivalier aguerri devient une sorte de rat de laboratoire, errant dans le Palais une bonne partie de la journée, arpentant les étages, longeant le Marché du Film, flairant les opportunités de rencontres ou de visionnages. J’allais jusqu’à cinq projections par jour, dans un mélange d’euphorie et l’excès. Le sommeil ? Un luxe. Les repas ? Je me nourrissais essentiellement de pellicule.
Cannes reste l’un des plus grands carrefours du cinéma mondial. On y vient pour découvrir les chefs-d'œuvre qu’on attend depuis un an, ceux dont la bande-annonce n’est même pas encore sortie. Voir un Ken Loach, un Nanni Moretti ou un Dardenne en mai, quand les autres devront attendre octobre, ça n’a pas de prix. C’est irrationnel, un peu snob, mais bien réel. Et puis il y a les sélections parallèles : la Quinzaine, l’ACID, la Semaine de la Critique. On y va parfois sans aucune idée de ce qui nous attend, guidé par une ligne de synopsis ou un dossier de presse énigmatique. Et parfois, on tombe sur une pépite. Lors de mon tout premier festival, j’ai découvert Element of Crime, d’un certain Lars Von Trier, jusqu’ici inconnu au bataillon.
Un court voyage au bout de l’ennui
Mais il faut bien l’admettre : tout le monde ne vient pas à Cannes pour les films. Ma première grosse désillusion fut de constater que certains festivaliers n’aimaient tout simplement… pas le cinéma. C'est toujours d'actualité : pour d’obscures raisons, les sièges claquent parfois au bout d’une vingtaine de minutes. Quand on sait la patience qu’il faut pour obtenir des invitations, cela peut surprendre. Lors de chaque projection, on contemple un ballet obscur de silhouettes filer vers la sortie - et pas seulement pour des films dits « difficiles » ou « expérimentaux » -, mais cela arrive aussi à l'occasion d'évènements très attendus : un Scorsese ou un Spielberg... il y a toujours des candidats au départ. "Étonnant, non ?" aurait dit Desproges. Pour ces gens-là, la vraie question n’est pas “Qu’est-ce qu’on projette ce soir ?”, mais “T’as une invit pour la soirée Nespresso ? »
Une fête cannoise ressemble à un samedi soir au Macumba version VIP. On peut y marcher sur les pieds d’Isabelle Adjani, ou croiser Harvey Keitel aux toilettes. J’ai le souvenir d’avoir vu un gâteau géant flotter d’un bord à l’autre d’une piscine illuminée, lors d’une fête organisée par le magazine Première, pendant que des starlettes gloussaient en talons aiguilles… la Dolce Vita version disco-trash.
Parmi les festivaliers, on peut distinguer plusieurs catégories :
Les puristes : souvent seuls, ils lisent Les Cahiers du cinéma ou Positif en file d’attente. Ils parlent de tempo intérieur au lieu de rythme, et attendent impatiemment la nouvelle œuvre en plan fixe venue d’Asie centrale. Ils ne sourient jamais (sauf ironiquement). Cannes est pour eux un lieu de pèlerinage, mais aussi un ring où ils peuvent toiser le commun des mortels en prononçant : « Le dernier Desplechin, c'était déjà trop grand public. »
Les snobs : tout est dans la couleur du badge et la moue assortie. Tels des Gris du Gabon, ils répètent des phrases glanées au cocktail Unifrance, assistent aux projections se délectant à l’avance des critiques assassines qu'ils débiteront en descendant les marches. Leur tenue de soirée coûte le budget d'un film indépendant.
Les arrogants du Marché : ils parlent fort, très fort, téléphone collé à l’oreille. « On est en compète à Locarno, là, mais je peux te caler une projo privée sur Paname. » Ils n’ont jamais réalisé un film, mais ils “lancent des projets”. Ils prennent le soleil à la terrasse du Majestic, en répétant qu’ils doivent filer “chez Canal”.
Les poseurs de tapis : lui, lunettes miroir, elle, robe fendue jusqu’au diaphragme. Ils ne savent pas qui est David Lynch, mais ont le don de se placer pour que le photographe du tapis rouge les shoote comme s’ils arrivaient de L.A. Ils font une story Insta sur un film qu’ils n’ont pas vu : “Merci à l’équipe pour ce moment incroyable”. Leur talent principal ? Prendre une coupe de champagne sans transpirer. Leur cauchemar ? Être refoulés d’une soirée ; n’importe laquelle, ça n’a pas d’importance.
Les comédiens fantômes : on les reconnaît à leur sourire crispé. Ils errent de rendez-vous en rendez-vous sans qu’on sache s’ils ont un film ou un agent. Leur tactique : glisser une carte de visite dans la main d’un producteur entre deux olives lors d’un cocktail.
Les jeunes réalisateurs : ils sortent d’école, de résidences, de bourses CNC. Cannes les écrase, mais les galvanise. Ils regardent chaque badge avec l'espoir d’y lire “programmateur”, “acheteur”. Leurs nuits sont courtes, leurs jambes flageolantes, et leurs poches vides. Mais ils sont là pour les bonnes raisons : ils croient encore au cinéma
Les vrais cinéphiles : ils font la queue trois heures pour voir un film roumain sans sous-titres. Ils pleurent discrètement pendant les applaudissements. Ils connaissent tous les cinémas cannois de secours. Ils montent les marches à la séance de 8 heures du matin, n’iront à aucune fête, mais leur cœur se met à battre dès que l’écran s’illumine.
Les accros aux cocktails : ils n’ont pas vu un seul film, mais savent parfaitement où se trouvent les meilleurs buffets. Ils passent leur festival à scruter les listes d’invités. Ils sont toujours “sur un coup” : une soirée yacht, un dîner, une pool party d’influenceurs. Ils n’ont rien à dire, mais conversent avec un petit rire et une coupe à la main. Ils confondent networking et tourisme alcoolisé.
Cet obscur objet du scandale
Cannes, ce n’est pas qu’un festival, mais aussi un ring où les films ne se contentent pas d’être projetés : ils sont jugés, scrutés, hués, adulés, parfois carbonisés le jour de leur projection. Sur la Croisette, un long-métrage peut changer de destin en une minute. Un applaudissement de trop, un sifflement sonore, et le verdict devient viral avant même que le générique de fin ne s’achève. Le public se transforme en inquisiteur, hystérisé par l’adrénaline. Il y a des projections qui ont viré à l’émeute, des œuvres qui ont divisé une salle en deux clans irréconciliables. On s’y bat à coups de tribunes dans Le Monde, de tweets furieux et de débats furieux où chacun tente d’imprimer sa vérité. Cannes adore ces collisions, elles font partie du folklore.
Le vrai scandale, souvent, c’est que la Croisette a besoin du scandale. Il nourrit la bête médiatique, fait tourner les flashes, occupe les chroniqueurs, réveille un public blasé. Et le Festival aime faire mine de s’en offusquer, tout en le programmant avec soin.
Petit rappel des temps forts qui ont marqué l’histoire - entre provocations, polémiques, débordements en salle et coups médiatiques. Ces épisodes montrent à quel point le cinéma n’est jamais tout à fait séparé du tumulte du monde ni des égos qui s’y affrontent.
La Grande Bouffe (1973)
Le film de Marco Ferreri, avec Marcello Mastroianni, Michel Piccoli et Philippe Noiret, raconte l’histoire de quatre hommes qui décident de se suicider collectivement en mangeant jusqu’à la mort. À la projection, le public hurle, certains sortent en vomissant. La presse se divise. Certains crient au chef-d'œuvre, d'autres à la pornographie gastro-théâtrale. Une chose est sûre : le scandale est tel qu’il propulse le film au rang de mythe.
Antichrist (2009) : Lars Von Trier, encore et toujours
Lars von Trier est un habitué des provocations, mais, avec Antichrist, il atteint un sommet. Scènes de mutilation sexuelle explicite, esthétique morbide, pessimisme radical. La projection déclenche des malaises, des départs précipités, des hurlements. Le film est pourtant salué par une partie de la critique pour sa radicalité. L’actrice Charlotte Gainsbourg recevra le Prix d’interprétation. Un scandale qui, comme souvent à Cannes, fait vendre.
Irréversible (2002) : le temps détruit tout… et une salle traumatisée
Gaspar Noé, enfant terrible du cinéma français, signe un film choc, tourné à l’envers, avec une scène de viol interminable en plan-séquence. De nombreux spectateurs quittent la salle, certains vomissent, d’autres restent pétrifiés. C’est violent, insoutenable : et pourtant, Irréversible entre instantanément dans l’histoire. Un exemple parfait du pouvoir de sidération du cinéma sur ce microcosme. Cette année-là, je l’ai vu à Paris, le même jour que sa projection cannoise. Facile d’imaginer la claque qu’il avait dû provoquer dans la grande salle du Palais, là où tout est plus fort… plus viscéral, et de constater l’effet produit sur le festivalier mondain parfois déconnecté du réel (voir la vidéo).
Fahrenheit 9/11 (2004) : Palme d’or… politique
Le documentaire de Michael Moore, virulente attaque contre l’administration Bush après les attentats du 11 septembre, provoque une onde de choc. Certains accusent le festival de s’être politisé, d’autres saluent le courage. Quentin Tarantino, président du jury, assume totalement ce choix. Le film devient un phénomène mondial. Un documentaire, Palme d’or à Cannes ? Un scandale pour les uns, un symbole pour les autres.
Lars Von Trier déclaré “persona non grata” (2011)
Lors de la conférence de presse de Melancholia, le trublion plaisante lourdement sur Hitler, dit “comprendre” les nazis, et s’enfonce dans une auto-destruction spectaculaire. La direction du Festival réagit aussitôt : le réalisateur est déclaré persona non grata, une première dans l’histoire de Cannes. Le film reste en compétition (et Kirsten Dunst remporte le Prix d’interprétation), mais Von Trier est banni pendant plusieurs années. Ironie de l’histoire : il reviendra en 2018… avec The House That Jack Built, encore plus dérangeant.
Netflix vs Cannes : la guerre du streaming (2017–2018)
Quand "Okja" et "The Meyerowitz Stories" sont sélectionnés en 2017, Netflix refuse de les distribuer dans les cinémas français. Tollé. Cannes modifie son règlement l’année suivante : seuls les longs-métrages avec sortie en salle peuvent concourir en compétition officielle. Netflix, vexé, boycotte le festival. Le débat sur l’avenir du cinéma explose : salles contre plateformes, traditions contre mutations.
Jean-Luc Godard, maître de l’arrogance
Godard aura marqué Cannes par ses chefs-d’œuvre, mais aussi par ses coups d’éclat. En 2014, il refuse de venir pour Adieu au langage, mais envoie une vidéo où il fait la leçon au jury. En 2018, même chose : Le Livre d’image est présenté sans lui. À chaque fois, il plane comme un fantôme génial et en colère. JLG aura réussi à faire scandale… par son absence.
Des seins, des robes, des selfies… et pas assez de films
Depuis les années 2010, Cannes devient aussi le terrain de jeu des influenceurs et de la mode. Certains jours, on voit plus de mannequins que de metteurs en scène. Les marches sont envahies de poses Instagram, et les photographes se détournent d’un réalisateur iranien bouleversant pour ne pas rater une robe transparente. Les cinéphiles grondent. Le Festival essaie d’interdire les selfies (en vain). Le cinéma résiste… mais le parfum du luxe l’étouffe peu à peu.

Short Film Corner : l’autre festival
Le Short Film Corner (SFC) est souvent présenté comme le festival dans le festival, ou plus exactement, comme le marché du court-métrage au sein du Marché du Film de Cannes. Pourtant, rares sont ceux qui en comprennent réellement le fonctionnement, ses enjeux, ses limites et ses atouts. Ni compétition, ni vitrine publique, le SFC est avant tout une plateforme professionnelle d’accès et de visibilité pour les réalisateurs de court-métrage. Et un terrain d’apprentissage rude, mais formateur.
Contrairement à la Semaine de la Critique ou à la Quinzaine des Réalisateurs, le Short Film Corner n’est pas une sélection artistique : tous les films inscrits et validés techniquement y figurent. Il ne s’agit donc pas d’une distinction honorifique, mais d’un accès à une plateforme de diffusion professionnelle. C’est un espace de mise en réseau, pensé pour donner une chance à chaque film - dans un écosystème néanmoins ultra-compétitif.
La sélection implique le versement de frais d’inscription (environ 95 à 130€ selon les années). En échange, les réalisateurs reçoivent un badge Marché du Film, un espace personnel en ligne, la présence de leur film sur les bornes numériques du SFC, et l’accès à toutes les activités parallèles du Corner.
Sur place : un environnement structuré, mais dense
Le Short Film Corner se situe au Palais des Festivals, dans une zone réservée aux accrédités Marché du Film. Chaque film inscrit est accessible sur des bornes de visionnage individuelles, consultables à la demande par les professionnels présents (programmateurs, distributeurs, acheteurs, institutions, etc.). Chaque film est accompagné d’une fiche technique, d’un pitch, d’un visuel et des coordonnées de l’auteur. Mais il faut être réaliste : des milliers de courts sont disponibles chaque année, et il est difficile d’exister sans une vraie stratégie.
Autour de cette “vidéothèque” géante, le SFC propose un programme dense de conférences, panels, ateliers et sessions de networking. Parmi les thématiques souvent abordées :
Comment construire une carrière après le court
Comment vendre son film à l’international
Comment approcher les festivals
Quelles erreurs éviter dans un pitch ou un teaser.
Ces conférences, souvent données par des professionnels reconnus, sont gratuites pour les participants. Leur niveau varie, mais certaines peuvent se révéler précieuses, surtout pour les primo-réalisateurs. Participer au Short Film Corner, c’est aussi apprendre à se faire une place dans un marché saturé. Tout le monde a un film et chacun cherche à exister. Les journées sont épuisantes, les conversations parfois superficielles, mais c’est là que naissent les vrais premiers contacts professionnels.
La différence ne se joue donc pas uniquement dans le film lui-même, mais dans votre capacité à le défendre. Un bon teaser, une fiche claire, une accroche solide, une attitude pro mais détendue : tout compte. Certains y signent des ventes pour des plateformes VOD internationales. D’autres décrochent des sélections en festivals étrangers. Beaucoup y prennent une claque utile : celle qui oblige à retravailler leur discours et à penser en termes de stratégie.
Ce qu’il faut savoir avant de s’inscrire :
Le SFC n’est pas un tremplin automatique vers Cannes “officiel”, mais il peut ouvrir des portes si l’on vient préparé.
Le volume de films est gigantesque : sans communication ciblée, vous êtes invisible.
Un bon matériel promotionnel (bande-annonce, pitch vidéo, visuels, synopsis clair) est indispensable.
Les badges Marché du Film permettent d’accéder à d’autres espaces professionnels que le SFC.
Le site propose également un accès en ligne étendu après le festival, où les professionnels peuvent continuer à consulter les films.
Enfin : soyez prêts. Cannes ne vous attend pas. C’est à vous de provoquer les opportunités.
Le Short Film Corner est ce que vous en faites. Il peut être un accélérateur ou une déception. C’est un environnement imparfait, bruyant, parfois frustrant — mais c’est aussi un précieux terrain d’entraînement pour se confronter à la réalité du métier. Pour qui veut apprendre à se positionner, à défendre une œuvre, à respirer dans le monde de la production, le SFC est une étape utile.
Je m'y suis rendu, il y a quelques années, grâce à Parc Avenue, un court-métrage co-réalisé avec Christine Soldevila. On y apprend à parler de son projet, à le défendre en une minute trente, à se frayer un chemin dans un environnement où personne ne vous attend, mais où tout est possible. C’est un lieu où beaucoup découvrent que faire un film, ce n’est que la moitié du chemin. Il faut ensuite le porter à bout de bras, au milieu d'une rude concurrence, mais on y retrouve ce que le cinéma a de plus beau : le désir de raconter une histoire.
Quelques recommandations d’usage pour les futurs festivaliers :
Ne venez pas à Cannes pour être vu. Sachez que le plus grand luxe, ce n’est pas d’avoir un styliste, mais d’avoir vu un chef-d’œuvre que personne d’autre n’a encore repéré.
Habillez-vous léger, mais confortable. Vous passerez vos journées à marcher, courir, transpirer, être refoulé, poireauter. Vous, partez pour une expédition.
Votre badge n’ouvre pas toutes les portes, mais attention : même avec une accréditation, tout peut vous échapper. Prévoyez des plans B, C, D. Et des amis dans les sélections parallèles.
Restez curieux. Les vraies pépites ne sont pas sur la montée des marches, elles sont dans les petites salles, à la Quinzaine, à l’ACID, là où personne n’a encore lancé la promo.
Fuyez les influenceurs. À moins que vous aimiez les selfies crispés et les commentaires du type “ce film était méga chelou mais genre stylé”.
Ne confondez pas cinéma et luxe. Avec le prix d’une robe portée sur le tapis rouge, on peut financer deux courts-métrages et nourrir une équipe entière pendant un mois.
Heureusement, pour ceux qui aiment le 7e Art, on y vit plus intensément ; on en garde des souvenirs indélébiles. À Cannes comme ailleurs, ce qui reste, au fond, c’est le film, et la trace qu’il laisse.
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